Après deux bons mois d’interruption, voilà enfin le plaisir de retourner à mon atelier de sculpture et de céramique. Je vous en parlais déjà ici, mais j’ai profité de l’an passé pour prendre quelques photos afin de vous montrer comment on procède pour monter des pièces sans utiliser un tour de potier. Cette technique demande moins de doigté, car, à moins que l’on s’acharne à introduire des bulles d’air qui la ferait exploser dans le four, il est possible de travailler la terre indéfiniment (en l’empêchant de sécher) pour lui donner la forme souhaitée. Toutefois, il faut prendre garde à ce qu’elle reste bien droite, car une légère inclinaison non souhaitée est très difficile à reprendre.
La première étape consiste à préparer la terre. Il faut la tabasser, c’est-à-dire, projeter plusieurs fois de suite un bloc d’argile neuve, avec une certaine force, sur une épaisse planche en bois, afin de lui donner une forme cubique. Cela permet de tasser les particules d’argile et d’expulser les éventuelles bulles d’air.
À l’aide d’un rouleau à pâtisserie en bois, posé sur deux tasseaux de même épaisseur, on étale le bloc afin d’obtenir une plaque homogène.
Pour former le fond du vase, on utilise une demi sphère en plâtre, autour de laquelle on enveloppe, sans trop appuyer, un morceau de la plaque de taille suffisante (j’ai oublié de prendre une photo !). Délicatement, on décolle le plâtre avant de l’ôter. On obtient ainsi une coupe qu’on pose sur une petite planche, elle-même déposée sur une tournette. Avec une petite bande de tissu mouillée, on maintient humide le rebord, pendant qu’on s’occupe de découper des bandes dans le reste d’argile étalée.
Pour cela, on utilise la largeur d’un tasseau comme une règle pour découper des bandes régulières. Afin de les empêcher de sécher, on les emballe dans du plastique (sac poubelle) bien à plat au fur et à mesure.
Afin de monter le premier étage du vase, on enroule une bande autour du bord de la coupelle en les faisant légèrement se chevaucher, tout comme les extrémités de la bande elle-même (si elle est trop courte, on peut en ajouter plusieurs bout à bout).

Pour élargir, on place à la bande à l’extérieur, pour rétrécir, on la place à l’intérieur. Puis, on protège la jointure extérieure avec la bande de tissu mouillé.
À l’aide du dos d’une petite cuillère (ou avec une estèque comme sur la photo ci-dessous), on lisse peu à peu la jointure intérieure, en veillant à ne pas trop déformer la coupelle. Mieux vaut prendre son temps en appuyant légèrement, plutôt que de vouloir aller trop vite et introduire les fameuses bulles d’air.

Une fois, qu’on ne distingue plus de jointure, on ôte le tissu et l’on recommence avec la face externe. Cette fois, on utilise la pointe d’un couteau. Pour bien lier les bandes, vous pouvez mélanger la terre en faisant des scarifications légères.


L’opération est parfaite, lorsque vous ne sentez aucune différence en passant les doigts de part et d’autre du lieu où se trouvait la jointure.
Comme cette opération occasionne forcément des déformations, il faut réajuster la forme en plaçant un calibre circulaire de la bonne taille au niveau de l’orifice. À l’aide d’une estèque de la forme souhaitée, on resserre la terre tout autour du disque.
J’utilise cette technique, même si j’ai prévu de monter ma pièce toute droite, en employant une estèque droite pour retrouver la verticalité. Je trouve que le résultat est plus net qu’avec la technique classique suivante que je n'ai donc pas photographiée :
Pour monter tout droit, normalement, on superpose la bande parfaitement sur le bord de la coupelle après avoir veillé à bien le couper à plat. Pour cela, on utilise une règle posée à angle droit par rapport à la planche en bois pour marquer une ligne circulaire qui servira de repère pour la découpe.
On écrase, ensuite, la jointure intérieure avec un ébauchoir pour former un canal, dans lequel on ajoute un colombin(boudin d’argile) qu’on lisse avec la petite cuillère. Avant de faire de même avec l’extérieur.
On renouvelle la succession de bandes autant de fois que nécessaire pour obtenir la forme finale souhaitée.
Comme la terre à tendance à s’écraser au fur et à mesure, il est souhaitable de laisser un peu sécher chaque étage avant de procéder au suivant. Pour cela on laisse de côté la pièce une ou deux heures avec le tissu mouillé sur le rebord pour l’empêcher de sécher, tout en permettant au fond de durcir.
On peut recommencer plusieurs jours plus tard. Auquel cas, on emballe délicatement le vase dans plusieurs sacs en plastique, hermétiquement fermés. Lorsqu’on recommence, il faut faire du palming sur le rebord. C’est-à-dire, placer le tissu humide sur le bord et frotter doucement avec les doigts pour faire pénétrer l’eau dans la terre. On peut également frotter les bandes en réserve d’une façon identique, pour que la terre des deux parties soit d’une plasticité identique.
Une fois la pièce terminée, on passe du temps à la lisser, ou l’on attend qu’elle soit sèche pour la poncer avec du papier de verre afin de faire ressortir sa texture si elle est chamottée. Pour que l'émail se répartisse régulièrement au niveau de l'ouverture, il faut éviter les angles et donc bien arrondir le bord.
Il ne reste plus qu’à procéder à la première cuisson, le biscuit, la maintenant suffisamment poreuse pour être émaillée avant la cuisson suivante. Mais, ce sera pour une prochaine fois !